Saint Bernard de Menthon ( de Mont-Joux – d’Aoste – du Mont-Blanc)

La Congrégation des Chanoines Réguliers du Grand-Saint-Bernard doit son origine à Bernard de Menthon, de Mont-Joux, d’Aoste ou du Mont-Blanc. Au service de l’évêque d’Aoste, dont il devint l’Archidiacre, il fut chargé du soin des pauvres, il accueillait régulièrement de nombreux passants (pèlerins, marchands, soldats, ou simples voyageurs) qui venaient de franchir le col du Mont-Joux (Mont Jupiter), reliant le Nord et le Sud de l’Europe, et qui arrivaient en plaine, blessés, dévalisés, à bout de force, encore sous le coup des épreuves de toutes sortes qu’ils avaient dû affronter : tempêtes, avalanches, brigandage; beaucoup de leurs compagnons y avaient même laissé leur vie.
En effet, situé à 2 473 mètres d’altitude, recouvert de neige sept mois par an, le passage du Mont-Joux était depuis toujours la hantise des voyageurs qui ne pouvaient choisir d’autres routes. Ému par les dangers auxquels sont ainsi affrontés les passants, Bernard décide de construire une maison d’accueil sur le col lui-même, afin de les secourir plus efficacement. Désormais, la route passe par un havre de paix. La tradition populaire représentera Bernard en habit religieux, portant une étole, au moyen de laquelle il tient le diable enchaîné.
Fidèle également à sa vocation de prédicateur, Bernard ne cesse de parcourir la région pour y annoncer l’ Evangile, jusqu’à essayer d’apaiser les conflits entre l’empereur Henri IV et le Pape Grégoire VII. Il meurt à Novare, en juin 1081, entouré de la vénération populaire.
Refuge du voyageur en péril, la Maison d’accueil édifiée sur la montagne par Bernard portera dès lors le nom de « Hospice », et deviendra du même coup la demeure de Dieu par la vie de prière de ses habitants : « Ici, le Christ est adoré et nourri », telle est sa devise dès l’origine. Par ailleurs, Bernard confia son oeuvre à la protection de saint Nicolas de Myre, d’où l’appellation : « Congrégation des saints Nicolas et Bernard de Mont-Joux ». Une communauté de Frères se groupa autour de Bernard, engagée, comme lui,  dans le ministère de secours sur la montagne et dans le ministère de la prédication alentour.
C’est ainsi que, très tôt, la petite communauté adopta la Règle de saint Augustin, se rattachant par là à l’Ordre des Chanoines Réguliers et se vit confier la charge de desservir les paroisses de la région, sur les deux versants de la montagne.
Par là se dessine dès l’origine la double mission fondamentale de notre Congrégation : l’accueil  et le ministère pastoral.
Rappelons que Bernard fonda également un deuxième Hospice, au col du Petit-Saint-Bernard, reliant la Savoie et la Vallée d’Aoste. Cette maison fut habitée par des chanoines du Grand-Saint-Bernard jusqu’au 18è siècle. Une Fondation Internationale en a fait un gîte d’étape pour les randonneurs.
A noter aussi, dès le 17è siècle – ou peut-être même plus tôt – la présence des fameux chiens, si précieux pour accompagner les religieux dans leurs expéditions à la recherche des voyageurs égarés dans la neige.
Saint Bernard de Mont-Joux est fêté le 15 juin.

Voir les textes de la Liturgie de la fête   
Ecouter l’Office liturgique   

Que savons-nous de ses origines? Comment lire sa vie au travers des légendes, des écrits et des représentations iconographiques qui traversent l’histoire?

Bernard de Menthon naît vers 1020. Archidiacre d’Aoste, il fonde vers 1050 un refuge, au col du Mont-Joux (2’473m. alt.), qui porte désormais son nom : l’hospice du Grand-Saint-Bernard. Il reconstruit un hospice à Colonne-Joux, celui du Petit-Saint-Bernard. Prédicateur itinérant, il meurt à Novare le 12 juin 1081 ou 1086 et y est enseveli le 15, jour retenu pour sa fête. Il est canonisé par l’évêque de Novare en 1123, puis déclaré « Patron des alpinistes, des voyageurs et habitants des Alpes » par le Pape Pie XI, en 1923.
Bernard, né d’une famille noble vers 1020, vit une enfance et une adolescence sereines, avant de s’orienter vers la vie ecclésiastique. Ordonné diacre, il devient membre du Chapitre de la cathédrale d’Aoste où il exerce la fonction d’archidiacre, qui est à cette époque le premier collaborateur de l’évêque. Prédicateur itinérant, il exhorte la population de son diocèse et des régions environnantes à la conversion, étant lui-même un exemple de sobriété et de vertus. Des miracles authentifient la véracité de ses paroles, ce qui lui donne un grand succès populaire.
Pour sécuriser les Alpes, Bernard établit un lieu d’accueil au col du Mont-Joux, vers 1045-1050. Il garantit la survivance de son œuvre d’hospitalité en lui affectant les revenus du monastère de Bourg-Saint-Pierre, désormais désaffecté. Les premières constructions, refuges de taille minuscule (1.50 mètre sur 3), permettent de s’abriter pour la nuit, la chaleur corporelle étant l’unique moyen de se réchauffer. Bernard et ses compagnons construisent dès que possible le premier hospice, bâtisse de 18 mètres sur 13.50 sur la partie nord du col, qui sera agrandie au cours des siècles. Ils utilisent les pierres des ruines voisines du temple de Jupiter et de ses annexes que les Romains avaient érigés à l’autre extrémité du lac . Bernard le place sous le patronage de saint Nicolas de Myre, patron des marchands, dont le culte est en expansion de l’Italie à l’Allemagne du Sud. Bernard reconstruit également un hospice au sommet du col de Colonne-Joux, l’actuel Petit-Saint-Bernard.
Prédicateur itinérant, Bernard exerce son ministère de la parole non seulement dans la région d’Aoste, mais encore dans régions limitrophes. Il se rend à Pavie, où se trouve alors l’empereur Henri IV, qui prépare une expédition belliqueuse contre le pape Grégoire VII. Bernard le rencontre et tente en vain de le détourner de son projet. Sur le chemin du retour, malade, Bernard s’arrête au monastère de saint Laurent-hors-les-murs, à Novare. C’est là qu’il meurt. Il y est enseveli 3 jours plus tard, le 15 juin 1081 (1086 ?). En raison des miracles obtenus sur la tombe de Bernard, Richard, évêque de Novare, le canonise en 1123. Les hospices fondés par saint Bernard ont marqué ses contemporains. Ils ont ainsi renommé en son honneur le col du Mont-Joux en « Grand-Saint-Bernard » et celui de Colonne-Joux en « Petit-Saint-Bernard ».
La vie de saint Bernard est embuée de légendes. Le panégyrique de Novare, dont le texte le plus ancien se trouve dans le Passionale d’Intra, daté de 1128, raconte les dernières semaines de sa vie. Il a probablement été écrit à l’occasion de sa canonisation en 1123, par Richard, évêque de Novare. L’auteur de ce texte indique dans son prologue qu’il ne parlera que des faits qu’il connaît. Il précise qu’il laisse le soin à un parent du saint, Azolin, d’écrire sa vie, mais cette dernière ne nous est pas parvenue. En raison de l’absence de traces de cette vie dans les anciens ouvrages liturgiques des diocèses de Novare et Aoste, nous pouvons conclure que cette vie n’a probablement jamais été écrite. Il existe certes une vie du XV° siècle attribuée à un certain Richard de Valdisère, ainsi qu’un Mystère qui a popularisé les éléments de la légende, mais ces derniers n’ont aucune crédibilité historique.
Le jour de la mort et de la sépulture de Bernard, les 12 et 15 juin, sont contenus dans le panégyrique. La date traditionnelle retenue pour sa fête est celui de sa sépulture, « 17 des calendes de juillet », selon le calendrier romain, qui correspond au 15 juin. Saint Bernard est célébré le 15 juin tant à Novare, à Ivrée, Verceil, Sion qu’à l’hospice du Grand-Saint-Bernard. Cette date a également été retenue par le calendrier de l’église universelle, en 1681. Le pape Pie XI a déclaré saint Bernard patron des alpinistes le 20 août 1923. Pour la mort du saint, l’année 1086 est retenue par le convent de saint Laurent-hors-les-murs de Novare, où Bernard est décédé. Lorsque son crâne a été placé dans un reliquaire, le jeudi 15 juin 1424, un document notarié a été rédigé pour commémorer l’événement. Il s’appuie sur d’antiques documents, aujourd’hui disparus. On y lit que saint Bernard est mort en 1086 («anno millesimo octuagesimo sexto»). Une seconde année est également retenue pour la mort de Bernard: 1081. Elle est obtenue en reconstruisant l’itinéraire de l’empereur Henri IV, d’après les actes rédigés de son vivant. Si les éléments chronologiques du panégyrique sont exacts, saint Bernard l’y aurait vu entre le 15 et le 26 avril 1081 et serait mort un peu plus de six semaines plus tard à Novare.
La première représentation connue de saint Bernard remonte aux années 1200 à 1230. C’est son buste reliquaire de style roman, conservé à l’hospice du Grand-Saint-Bernard. Bernard présente de ses deux mains l’évangéliaire. Il porte les habits liturgiques du diacre durant la messe, c’est-à-dire qu’il a enfilé son aube blanche, serrée aux poignets, puis, au-dessus de l’étole diaconale non visible sur le reliquaire, il a passé la dalmatique, qui se reconnaît à ses manches larges arrivant entre les poignets et les coudes.
Une seconde iconographie présente le saint en habit de chœur de chanoine, c’est-à-dire avec la soutane, le rochet et l’aumusse en peaux d’écureuils, prêt à chanter les psaumes. Une fresque du château de Fénis, datée du14e siècle, présente le saint dans cette tenue, assailli par des gens qui lui présentent leurs requêtes, sous forme de rouleaux, et leurs offrandes. Les stalles de la cathédrale d’Aoste, à la place de l’archidiacre, présentent une iconographie comparable, datant du début du 15e siècle. Saint Bernard y est présenté debout, en tenue identique. Il tient de sa main gauche le bourdon, indiquant son rang d’archidiacre, et de sa main droite le livre des évangiles.
Dans sa troisième iconographie, dont les plus anciennes représentations semblent remonter au 15e siècle, saint Bernard est en habit ordinaire, qui est l’habit religieux des chanoine du Grand-Saint-Bernard de la fin du Moyen Âge. Il s’agit d’une soutane noire recouverte par un rochet blanc, dont les manches ont été coupées, mais qui descend presque jusqu’à ses mollets, dont le fond est lié sur le côté gauche. Cet habit ressemble à celui des moines cisterciens, mais en inversant les couleurs. Depuis 1487, les chanoines du Grand-Saint-Bernard peuvent porter, au-dessus de leur soutane, un rochet réduit à quatre doigt de largeur, passé en sautoir autour du cou, et qui est attaché à gauche, à mi-cuisse. Saint Bernard, dans cette iconographie est présenté en prédicateur, également avec le démon enchaîné à son étole.
L’iconographie dominante de saint Bernard est liée à la diffusion de légendes à son sujet. Le saint est présenté debout, en soutane noire, rochet blanc et aumusse en peaux d’écureuil. Il tient en main le bâton d’archidiacre, appelé le bourdon, ainsi que l’étole qui se transforme en chaîne pour mâter le démon, soumis, à ses pieds. Il existe des variantes à cette iconographie classique, principalement sur des tableaux. Les éléments ajoutés peuvent être des fragments du temple ou de la statue de Jupiter qui existaient autrefois au sommet du Mont-Joux. C’était d’ailleurs le temple dédié à Jupiter le plus haut de l’Empire romain. Un ajout plus fréquent, ce sont deux colonnes, situées en arrière-plan, de part et d’autre du saint. Elles symbolisent les cols du Mont-Joux et de Colonne-Joux avec, parfois, les hospices construits par saint Bernard à ces emplacements. Le démon soumis représente non seulement la victoire du christianisme sur les résidus de paganisme alpin, mais encore les hospices eux-mêmes. Du fait qu’ils existent et que leurs habitants allaient chaque jour de l’hiver à la rencontre des passants, souvent au risque de leur propre vie, la charité des habitants des hospices vainc les dangers de la montagne que sont le froid, la faim, la tempête, le brouillard, la neige, l’épuisement, voire la mort, sans oublier les brigands et autres détrousseurs de passants.
Notons une nouveauté iconographique remontant au 19e siècle. Au-lieu d’accompagner saint Bernard du démon, enchaîné et vaincu à ses pieds, comme il était coutume de le faire depuis le 15esiècle, le démon est parfois enlevé et remplacé par un chien saint-Bernard. La signification du chien est à l’opposé de celle du dragon. Ce ne sont plus les dangers de la montagne qui sont évoqués, avec l’iconographie monstrueuse des lieux désolés de haute altitude. Cette fois, c’est l’œuvre hospitalière avec les sauvetages qui sont évoqués. Nous sommes dans le registre de l’exaltation de la charité où l’homme trouve un collaborateur animal au flair légendaire. Cette iconographie suit l’esprit romantique qui change les mentalités face à la montagne. D’endroit mortel redouté, elle devient un endroit mythique, préservé de la civilisation, qui verra bientôt l’affluence des touristes.
Les différentes manières de représenter saint Bernard vont progressivement se mêler. Il est parfois représenté avec la dalmatique et le diable enchaîné. Depuis 1674, années où les chanoines de l’hospice abandonnent l’aumusse en fourrure d’écureuils au profit du camail en feutrine de couleur rosacée, le saint est parfois représenté en camail. Il faut également signaler que la réputation de saint Bernard de Clairvaux a surpassé celle de son homonyme, provoquant ainsi des mélanges iconographiques entre eux, au fur et à mesure de l’éloignement géographique de la région comprise entre Novare, le Grand-Saint-Bernard et la Savoie.
Bernard, le saint fondateur des hospices du Grand et du Petit-Saint-Bernard, est connu et vénéré sous le nom de Bernard de Menthon, nom diffusé par la légende du saint, remontant à la fin du 14e ou au début du 15e siècle. Il est également connu sous le nom de Bernard d’Aoste, ville dans laquelle il exerçait la fonction d’archidiacre. L’appellation saint Bernard de Mont-Joux (ou Montjou) est attestée depuis le 13e siècle, pour le relier à la fondation de l’hospice du Grand-Saint-Bernard. Depuis le début du 19e siècle, l’appellation Bernard des Alpes est également en circulation, pour signifier qu’il est le patron des habitants et des voyageurs des Alpes. Lors de la restructuration des paroisses du diocèse d’Annecy, en 2004, l’ensemble des paroisses de la région de Chamonix s’est placée sous son patronage, sous l’appellation de saint Bernard du Mont Blanc afin de magnifier les lieux de son action, rayonnant autour du Mont-Blanc.